Ma source
Je n’ai
point assez du Baiser
Dont se
contente tout le monde
Et la source
où je veux puiser
Est plus
cachée et plus profonde !
De votre
bouche elle est la sœur !
En pied
d’une blanche colline
J’y
parviendrai, dans l’épaisseur
D’un buisson
frisé qui s’incline.
Elle est
fermée et l’on y boit
En écartant
un peu la mousse
Avec la
bouche, avec le doigt
Nulle soif
ne semble plus douce.
Près de
l’entrée on trouvera
Ce rocher
que frappait Moïse
Et je veux
que ma bouche épuise
Ce flot
d’amour qui jaillira !
Car ma
caresse ardente et forte
A fait
monter l’onde à ses bords !
Je suis à
genoux ; c’est la porte
Du
sanctuaire de ton corps.
Tu palpites
; je t’y sens vivre ;
Et je sens
grandir, qui m’enivre,
L’arôme
secret de tes flancs !
Car j’aime
tes parfums troublants
Plus que
l’odeur des forêts vertes,
Plus que la
rose et le jasmin,
Source vive,
aux lèvres ouvertes !
Et je
t’emporte dans ma main.
Senteur
divine ! Et ma moustache,
Ainsi qu’un
souffle d’encensoir,
Jette à mon
cerveau jusqu’au soir
Ce fumet où
mon cœur s’attache !
Guy de Maupassant